Narcoses
Extrait :
Le barman, Maxime Troppeux, dit Oxymore, l’interrogea du regard pour s’informer de sa commande. Elée hocha la tête sans rien dire, et celui-ci descendit lui chercher à la cave une bouteille de Pouilly. Il posa bientôt deux verres emplis d’un vin joliment mordoré et quelques morceaux de fromage sous le nez du commissaire.
- A quoi buvons-nous, ce soir ?
- Ne te crois pas obligé de m’accompagner à chaque fois, Oxymore. A ce rythme là, tu ne tiendras pas toute la nuit.
Troppeux effleura de son verre celui d’Elée.
- La juste mesure s’acquiert dans la convivialité. Nous sommes entre gens civilisés.
Après avoir empli ses narines du breuvage doré, Oxymore fit délicatement glisser le vin sur ses papilles et, plus discrètement encore, sur le fond de sa gorge, mais ne respecta pas à la lettre la dernière étape de la dégustation, qui consistait théoriquement à le recracher. Elée buvait silencieusement. Le barman poussa vers lui l’assiette de fromage.
- Un camembert au Calvados, amoureusement découpé par mes soins en petits carrés homogènes, pour satisfaire votre goût de l’ordre mathématique, et pour accompagner la saveur fruitée du Pouilly.
Elée posa un oeil sceptique sur le contenu de l'assiette, puis regarda Maxime.
- « Amoureusement », Oxymore ? Tu vires ta cuti ?
- Pourquoi pas ? Je n’ai jamais tâté du flic.
Elée lui tendit à nouveau son verre, vide désormais.
- Alors remets-moi ça. Je préfère ne pas être en état de me souvenir de tout ce qui se passera.